Petit ailleurs, 14 nouvelles sur la cabane : un recueil qui fera aimer la nouvelle

Paru aux éditions aNTIDATA en novembre 2017
220 pages

Il paraît que les nouvelles sont moins appréciées et moins lues que les romans, c’est en tout cas ce qui ressortait dans un article paru dans le dernier magazine LiRE. Et pourtant quel dommage car la nouvelle a plus d’un intérêt. Même si elle est exigeante, elle permet de découvrir le talent d’un auteur en seulement quelques pages, de grignoter au fil de nos envies une, deux ou trois fictions ou encore de découvrir des univers différents. Et ce n’est pas Petit ailleurs qui me fera dire le contraire.

Découverte totale d’une maison d’édition et de sa ligne éditoriale de qualité. Alors … aNTIDATA tu découvriras, à aNTIDATA tu succomberas. 

Je dois bien admettre que les deux premières raisons qui m’ont poussée à me procurer ce recueil ce sont les avis unanimes de Virginie et Nathalie mais aussi la présence de deux plumes que j’aime particulièrement. 

Et puis il y a quand même une troisième raison. Quand j’étais petite (je veux dire en âge) je rêvais que mon père me construise une cabane dans l’énorme cerisier que nous avions dans le jardin pour vivre mille aventures : une princesse enfermée dans une tour (bien que peu certaine qu’on vienne me délivrer), un agent secret, un safari, devenir Jane et vivre avec Tarzan (sans commentaires...) et j’en passe, ça vaut mieux. Bon et finalement je suis restée avec mon tipi ou ma tente je ne sais plus trop au pied du grand arbre. C’était bien aussi. Enfin tout ça pour dire que la troisième raison c’est celle-ci car les nouvelles de Petit ailleurs ont comme dénominateur commun la cabane. Toutes différentes et pourtant certaines se complètent à merveille. Lisez plutôt.

Elle ne reviendra pas – Louise Fonte

De cette vie qu'elle n'aime pas vraiment, une femme se fait la malle, sans prévenir. Surtout sans prévenir. Pas vraiment une première. Elle est d'un naturel à fuguer. La fugue a un goût de liberté. Alors elle roule pendant 600 km. Et elle respire, de nouveau, loin des obligations. Parce qu'on a tous le droit de choisir quelle vie mener...

Le Réveil du nain de jardin – Benoit Camus

Une cabane qui abrite les outils d'un vieux monsieur cultivateur. Face à ses courgettes, ne sachant pas s'il va pleuvoir, il observe. Et attend. Il surveille son nain de jardin quand le jeune Ismaël lui rend visite. C'est alors tout un silence ou presque qui se fait. Quelques mots, quelques doutes, quelques non-dits. Reflet de ces générations qui ne trouvent pas les mots pour se parler. Une nouvelle surprenante et touchante.

La Cabine de plage – Pascale Pujol 

Treize pages qui tiennent en haleine où le destin d'un petit garçon en quête de réponses croise celui d'une femme artiste aussi colorée qu'âgée. Une émouvante histoire qui entremêle la nostalgie de la vieillesse et l'espoir de la jeunesse.

Perché – Guillaume Couty

Voilà une cabane qui ne manque pas d'humour. Quand un avocat défend un client face à un procureur coriace qui ne compte pas admettre que le prévenu à respecter la loi du jeu cela donne une nouvelle douce et jubilatoire. Une petite parenthèse délicieuse qui nous donne envie de remonter le temps jusqu'à l'enfance.

En homme responsable – Gilles Marchand

Oui je le confesse, j'ai démarré le recueil par celle-ci puis par celle de Nicolas. C'est tout l'avantage des nouvelles, on les prend dans le sens qu'on veut. Pour celles et ceux qui connaissent Gilles Marchand, point de doute, sa plume est aussi belle dans neuf pages que dans trois cent. Neuf pages pour une bulle de poésie et de tendresse où le héros nous transporte dans sa double vie faite d'aventures et de quêtes imaginaires. Mais la différence dans le milieu professionnel, ne serait-ce pas un peu problématique ?

Transfert – Nicolas Houguet

La voilà la plume que je voulais tant découvrir, je la lis souvent à travers son blog et je l'aime beaucoup mais qu'allais-je découvrir en lisant Nicolas en tant qu'écrivain ? C'est toujours délicat de lire un ami mais mon petit doigt me disait de ne pas trop m'inquiéter. Il avait raison (comme souvent, entre nous).

Quand en douze pages un homme s'analyse parce que son psy n'est plus en état de le faire. Quand l'introspection fait remonter le fantôme d'une femme avec mélancolie et délicatesse. Mais n'ayez crainte, le sourire se dessinera malgré tout sur vos lèvres. Oui c'est là tout le talent d'un auteur, émouvoir par sa poésie, par l’intime et parvenir à nous faire sourire.

La Gueule de loup – Fabien Maréchal 

Une sorte de conte qui nous embarque dans les arbres (moi qui en rêvais !) où dame nature se fait attendre autant que le loup se montre et parle. Une cabane qui nous fait ressortir plusieurs points essentiels tels que l'importance de profiter de chaque instant, d'être soi-même, de regarder ses enfants grandir, de nourrir son imaginaire autant que sa vie réelle. Et d'aimer, toujours aimer.

Les Bains de mer – Laurent Banitz

Une nouvelle extrêmement touchante sur la solitude d’un homme après la première guerre mondiale, sur la perte d’un ami mais aussi sur l’histoire d’un amour, impossible, éphémère avec pour décor la plage du Crotoy et ses cabines de plage du 20e siècle.

Le Tokécho – Christophe Ségas

Quand un homme au physique disgracieux se retrouve coincé dans une cabane et devient le Tokécho, une œuvre d’art, l’attraction touristique d’un village. Une critique mordante de notre monde actuel, du marketing, du consumérisme et de l’effet mouton.

La Hutte continue – Bruno Pochesci

Amateur de science-fiction, cette nouvelle vous ravira. Elle pourrait d’ailleurs faire un bon épisode de série. Dans un monde chaotique, peut-être le nôtre, vivent quelques êtres au milieu d’une étendue rongée par un mystérieux Mal. Pour survivre ils doivent obéir à une montre-bracelet qui semble régir leur vie, leur liberté et édicter les codes. Une nouvelle angoissante. 

Un oubli – Johanna Jossau 

Une nouvelle toute aussi angoissante mais cette fois-ci nous sommes dans notre monde. Une jeune fille disparait, lorsqu’elle est retrouvée elle est amnésique. Personne ne sait ce qu’il a pu se passer cette nuit-là. Les années passent, et la cabane refait surface.

La linéarité affublée du masque grotesque de la relative jeunesse – Stéphane Monnot

Un titre surprenant pour une histoire qui dégage beaucoup de tendresse et de nostalgie dans laquelle un adolescent orphelin de père se réfugie sur un chantier à priori désert pour s’écarter du monde, puis pour observer cette jolie fille dont il est amoureux. Jusqu’au jour où une rencontre bouleversera sa vie.

Le petit coq rouge – Thierry Covolo

Une belle histoire qui mêle amour et musique. Un homme et une femme se plaisent, s'apprivoisent. Elle aimerait lui dire que peu importe le concert qu'ils s'apprêtent à voir, ce qu'elle veut surtout c'est être avec lui. Mais la pudeur vous savez ...

Et puis d'un coup, un élément perturbateur les fait se retrouver coincés dans ce bar-cabane. Un contact. Une musique. Qui s'élève. Qui enveloppe. Qui résonne.

Les Étés – Antonin Crenn

Une cabane de plage comme destination de vacances familiale. Chaque année, un jeune garçon part avec ses parents et son frère en bord de mer. Mais des aléas de la vie déguisés sous la plume imaginaire et poétique d’Antonin Crenn viennent bousculer l’équilibre. C’est l’une des nouvelles qui m’a le plus émue par sa thématique et son traitement. Elle m’a parfois sensiblement rappelé le récit de Max Porter, La douleur porte un costume de plumes. 

Nul doute que la nouvelle est un genre qui vaut la peine d’être découvert. Et à travers les quatorze présentes dans ce recueil où la cabane devient tour à tour souffle de liberté, lieu d’apprentissage, de rêverie, de repli ou d’angoisse, vous voyagerez dans des mondes imaginaires et imaginés par des auteurs talentueux.