ALERTE COUP DE CŒUR | De nos frères blessés de Joseph Andras

De nos frères blessés
Paru aux éditions Actes Sud en mai 2016 - 144 pages
Goncourt du premier roman 

Voici un roman qui a fait parler de lui au travers de son prix « Goncourt du premier roman» refusé par son auteur Joseph Andras. Mais nul besoin, selon moi, d’accepter ce prix (bien que mérité) pour prouver sa force, sa puissance et sa magnificence.



En quelques mots

Qui connaît Fernand Iveton ? Je l’admets, pas moi, ou en tout cas que très sommairement. Je pense que le temps ou encore les gouvernements ont fait en sorte d’enterrer son nom de l’Histoire ô combien dramatique.

Fernand Iveton, trente ans, est un Européen Algérien ouvrier et communiste. En pleine guerre d’Algérie, Fernand veut la liberté pour le peuple algérien. Engagé et déterminé, il posera une bombe dans son usine. Il a des convictions Fernand mais il est hors de question pour lui de faire des victimes, la bombe devra exploser une fois qu’il n’y aura plus personne au sein de l’usine.
Mais voilà, rien ne se déroule comme prévu et Fernand Iveton est arrêté avant qu’il ait pu faire exploser cette bombe.
Torturé, humilié durant des jours, il sera condamné à mort pour terrorisme, le seul européen d’Algérie condamné à mort... Lui, cet homme innocent de tous crimes ; Lui, un homme dont le seul désir était de voir l’indépendance être proclamée …



Mon avis


De nos frères blessés est le récit de Fernand qui reprend vie à travers la plume de Joseph Andras. Et quelle plume !

« Fernand a été torturé toute la journée ; il en a donné trois. De quelles matières sont donc faits les héros, se demande-t-il, attaché au banc, la tête en arrière ? De quelles peaux, de quels os, carcasses, tendons, nerfs, étoffes, de quelles viandes, de quelles âmes sont-ils fichus, ceux-là ? Pardonnez, les camarades… »

L’auteur à travers ce court récit nous conte l’histoire de cet homme somme toute normal qui aime l’Algérie, qui aime son peuple, qui aime la France et qui a foi en l’humanité.
Le récit démarre lorsque Fernand pose la bombe, nous suivons donc au fil des pages l’enchaînement des événements : de l’arrestation à la torture (âmes sensibles accrochez-vous !) et la détention en passant par le procès et la triste fin de cet homme. Mais comme pour redonner une respiration au lecteur, Joseph Andras entrecoupe ces moments douloureux par des flash-back heureux : la rencontre de Fernand avec sa femme en France et leur amour inconditionnel.
Et cela apporte une réelle force au roman puisque tout au long de la lecture on a le cœur serré que ce soit par l’injustice ou par l’amour.

« […] les mains d’une femme aimée, ou désirée, portent la même charge déchirante, la même fièvre sacrée que la bouche qui, un jour, sans toujours s’annoncer, s’approche ou se refuse à jamais […] »

Même en connaissant la fin tragique de Fernand Iveton, j’ai eu le même ressenti que Lucie du blog Abracadabooks : je n’ai pu m’empêcher de tourner les pages avec en moi un petit bout d’espoir comme-ci ces lignes écrites par l’auteur pouvait changer le cours de l’histoire… Si seulement …

Joseph Andras nous offre un roman poignant, douloureux mais également dénonciateur. Il y pointe du doigt la responsabilité de l’Etat français, cette injustice inconcevable à une époque où l’on se remet à peine de la seconde guerre. L’écriture est fluide, haletante mais également poétique. Tellement poétique ! L’auteur y parsème des mots, des phrases qui personnellement m’ont fait dresser les poils tant ils sont mélodieux et résonnent encore en moi comme un écho au loin.

« La lune baille et embrume l'obscurité de son haleine blanche. Maille étoilée - milliers de petites clés ouvrant la nuit.
Aujourd'hui, soixante-treize "rebelles" ont été tués. »

C’est un roman qui m’a marqué, qui me marquera encore longtemps et que je vous recommande de lire sans plus attendre. Pour ma part, je vais suivre de près ce jeune écrivain.

Ce que dit l'éditeur

Alger, 1956. Fernand Iveton a trente ans quand il pose une bombe dans son usine. Ouvrier indépendantiste, il a choisi un local à l’écart des ateliers pour cet acte symbolique : il s’agit de marquer les esprits, pas les corps. Il est arrêté avant que l’engin n’explose, n’a tué ni blessé personne, n’est coupable que d’une intention de sabotage, le voilà pourtant condamné à la peine capitale.
Si le roman relate l’interrogatoire, la détention, le procès d’Iveton, il évoque également l’enfance de Fernand dans son pays, l’Algérie, et s’attarde sur sa rencontre avec celle qu’il épousa. Car avant d’être le héros ou le terroriste que l’opinion publique verra en lui, Fernand fut simplement un homme, un idéaliste qui aima sa terre, sa femme, ses amis, la vie – et la liberté, qu’il espéra pour tous les frères humains.
Quand la Justice s’est montrée indigne, la littérature peut demander réparation. Lyrique et habité, Joseph Andras questionne les angles morts du récit national et signe un fulgurant exercice d’admiration.

Commentaires

  1. Réponses
    1. Tu as totalement raison et avais totalement raison sur le fait qu'il me plairait :-)

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  2. Ton billet confirme l'intérêt que suscite chez moi ce livre... même si je me dis qu'il va me falloir avoir le coeur bien accroché.

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    1. Effectivement il faut le cœur accroché à la fois par les détails présent dans ce récit mais aussi par la révolte qu'il peut susciter en nous.

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  3. Il me tentait déjà beaucoup mais si c'est un coup de coeur, je le note pour de prochains achats.

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  4. Bien aimé aussi,même s'il ne m'a pas totalement convaincu 😉

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