La dernière nuit de Raïs - Yasmina Khadra

Lu aux éditions Julliard - 216 pages

Ce livre me faisait envie depuis sa sortie, j’ai attendu ma petite carte cadeau Furet du Nord pour craquer sur ce roman magistral de l’excellent Yasmina Khadra.


4ème de couverture
« Longtemps j'ai cru incarner une nation et mettre les puissants de ce monde à genoux. J'étais la légende faite homme. Les idoles et les poètes me mangeaient dans la main. Aujourd'hui, je n'ai à léguer à mes héritiers que ce livre qui relate les dernières heures de ma fabuleuse existence.
Lequel, du visionnaire tyrannique ou du Bédouin indomptable, l'Histoire retiendra-t-elle ? Pour moi, la question ne se pose même pas puisque l'on n'est que ce que les autres voudraient que l'on soit. »

Avec cette plongée vertigineuse dans la tête d'un tyran sanguinaire et mégalomane, Yasmina Khadra dresse le portrait universel de tous les dictateurs déchus et dévoile les ressorts les plus secrets de la barbarie humaine.



Mon avis


Ce tyran que nous décrit Yasmina Khadra n’est autre que Mouammar Khadafi qui s’exprime sous la plume fictive de Yasmina Khadra. Le roman composé de 216 pages ne traitera que des dernières heures et de la dernière nuit de celui que l’on a appelé Frère Guide. 216 pages cela peut paraître long pour une seule nuit et pourtant ! On ne s’ennuie pas une seule seconde durant toute la lecture de cette fiction qui semble si réaliste.
Parlant de lui Khadafi semble être un homme tout à fait sain et équilibré ou plutôt un surhomme, comprenez mi-homme mi-Dieu tant son égo est surdimensionné. A peine s’adoucit-il et fait preuve d’une once d’humanité que sitôt on déchante et on lui retrouve ce visage de tortionnaire sans compassion aucune ni pour sa famille, ni pour ses hommes de main, ni pour son peuple meurtri. Si bien qu’on anticipe très vite, au fil de la lecture, ses réactions et ses actes.

« On raconte que je suis mégalomane. C'est faux. Je suis un être d'exception, la providence incarnée que les dieux envient et qui a su faire de sa cause une religion. »


Tout au long du récit on voyage dans les souvenirs de ce dictateur : sa prise de pouvoir, ses meurtres, son impression d’avoir apporté au peuple libyen sa liberté et sa prospérité, ses visions de Van Gogh. Sentant la fin arriver, il fait en quelque sorte son bilan final : bien loin des regrets, persuadé d’avoir détenu LA vérité, LA solution. Il affiche clairement son mépris au peuple libyen et à tous ceux qui osent encore le contredire et n’a aucun scrupule à écraser, rabaisser ou même tuer ses hommes de main qui pourtant l’idolâtre à en perdre la vie pour sauver la sienne. 
Ce récit est glaçant car l’on pourrait croire que Khadafi est fou, mais non, aucunement, à mesure que les pages avancent on comprend qu’il est bien lucide, bien conscient et convaincu de ses agissements. De quoi rajouter à l’horreur et au dégoût ressenti pour cet homme si infâme et sanguinaire. 

« Si c'était à refaire, j'exterminerais la moitié de la nation. J'en enfermerais une partie dans des camps pour l'initier au travail jusqu'à ce qu'elle meure à la tâche et je pendrais le reste sur la voie publique pour l'exemple. Staline n'avait-il pas hanté le sommeil des bons et des mauvais, des grands et des petits ? Il est mort dans son lit, couvert de lauriers et son peuple l'a pleuré à se noyer dans ses larmes. Le syndrome de Stockholm est l'unique recette qui marche avec les nations fourbes. »

Yasmina Khadra a ce don si particulier de nous faire passer ses idées, ses émotions sans aucun jugement ni parti pris et c’est ce qui me plaît tant chez lui. Même s’il s’agit d’une fiction, les pensées du Raïs sont tout à fait plausibles et c’est pour moi une des forces de ce roman.
Yasmina Khadra écrit, comme toujours, avec beaucoup d’éloquence et de talent ce roman qui pour moi fera sans conteste parti de mon top 2016. 

Informations aux lecteurs :
Avant d’aller plus loin dans la lecture de ce roman, je vous conseille, si vous ne connaissez pas bien l’Histoire, de faire quelques recherches sur la prise de pouvoir de Khadafi et la montée de sa dictature vous n’en comprendrez que mieux le roman.

Si celui-ci vous tente, je vous invite à découvrir un extrait par ici

© Amandine

Commentaires

  1. Encore un autre Khadra ! Pour ma part, quand j'aime un auteur, j'essaie d'espacer le plus possible la lecture de ses romans...

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    1. Et oui encore mais j'en suis devenue fan après avoir lu "l'attentat" je n'ai pas pu résister à celui-ci.
      Par contre effectivement là je compte espacer car en plus ce ne sont pas des sujets légers

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  2. Nous avons perçu ce roman de la même façon. En revanche, il me manquait un petit truc en plus pour en faire un coup de cœur ;)
    Ps : Bravo pour ton blog, je le rajoute dans mes favoris. A bientôt

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    1. Je comprends ce que tu veux dire, mais je suis tellement "amoureuse" de la plume de Yasmina Khadra que je n'ai pu m'empêcher de le mettre dans mes coups de cœur.

      Merci beaucoup Christelle :-) Je fonce voir le tien ce soir après le boulot.

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