Ce cœur changeant d’Agnès Desarthe : un demi-siècle d’aventures et de mésaventures

Ce coeur changeant
Paru en poche aux éditions Points
336 pages

Avec ce très joli titre tiré du poème « Marie » (recueil Alcools) d'Apollinaire, on s'attend à vivre un beau et grand moment de lecture ... Et pourtant ...




Née en 1889 à Sorø au Danemark, Rose a vécu une enfance tumultueuse auprès d’une mère névrotique et d’un père militaire et effacé. Rose a beaucoup voyagé entre son pays d’origine, la France puis l’Afrique, mais jamais seule. Toujours sa gouvernante, Zelada, qu'elle aimait tant la veillait. Alors lorsqu’à vingt ans, la tête remplie d’idéaux et sans un sou, elle débarque à Paris elle pense pouvoir vivre la grande et belle vie dans ce Paris rêvé. 
Mais d’aventures en illusions, la jeune fille va vite tomber de son petit nuage pour tenter de se faire une place dans cette société bousculée du tout début XXe siècle. 
Ainsi, la jolie jeune femme va bien vite tomber dans les affres de la misère et la pauvreté. Petit à petit, elle fera la connaissance de personnes qui lui viendront en aide mais causeront aussi sa perte. Car Rose suit son cœur, coûte que coûte, au risque de perdre pieds.



Agnès Desarthe nous livre ici du romanesque, et même du trop romanesque où le lecteur suit les quelques bonheurs et les grands malheurs d’une jeune femme en quête d’émancipation. Elle dresse le portrait d’une jeune femme puis d’une femme naïve mais forte à la fois tel un arbre qui plie avec le vent mais jamais ne se rompt. 
Ainsi Rose trouvera des bras tendus qui lui fourniront un logis tout en l’exploitant, bien loin de son confort familial. 
Puis Rose découvrira les plaisirs de la chair grâce à Louise, la sauvage, la passionnée, la féministe. A ses côtés, elle vivra une vie de bohème sans se soucier de l’argent. Louise la protégera de tous les dangers, la gardera au chaud dans une prison dorée jusqu’au jour où le passé de Rose la rattrapera…

Lecture en demi-teinte pour ce roman sélectionné pour le prix du meilleur roman des lecteurs de Points car si Ce cœur changeant porte haut et fort de grandes valeurs, notamment dans la construction de la vie d’une femme au XXe siècle avec cette part d'émancipation et de féminisme assumée, il n’en reste pas moins que l’on peut rester en retrait de cette héroïne assez niaise. Même si elle arrive parfois à nous attendrir, il est difficile, en effet, d’avoir de l’empathie pour un personnage que l’on a sans cesse envie de secouer en lui hurlant d’ouvrir les yeux et de prendre son destin en main plutôt que de le subir. 



Néanmoins, on ne peut retirer à Agnès Desarthe cette faculté de conter admirablement le début du XXe siècle, ses difficultés puis la guerre et enfin les années folles, le tout avec une plume alerte, charnelle qui permet au lecteur de se projeter dans cette période en pleine métamorphose. On y retrouvera d’ailleurs des similitudes avec Zola : la découverte sexuelle, l’affaire Dreyfus, la vision du monde bourgeois, la vie de bohème et les changements structurels du siècle, n'en sont que quelques exemples.
Même si, personnellement j’ai trouvé la dernière partie du roman bâclée et qu’il ne me restera pas grand-chose de l’héroïne, Ce cœur changeant est un roman qui respire la liberté, le déterminisme et la volonté de s’assumer en tant que femme.


Commentaires

  1. Un beau roman à savourer sous une couverture bien chaude :)

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    1. Comme quoi les lectures nous laissent tous un sentiment différent ;-)

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  2. Bon du coup j'hésite à le lire. À emprunter au pire.

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    1. Je suis effectivement pas convaincue qu'il vaille la peine de l'acheter. Si je viens en mars et que tu as envie de le découvrir, je peux te le ramèner.

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  3. Ah oui, tout pareil, jusqu'au "et pourtant" ! :)

    Trop de romanesque tuerait le romanesque ?
    Je crois surtout que si on veut lire ce genre de roman, eh bien on ouvre un Zola ... :)

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    1. Je ne sais pas si trop de romanesque tue le romanesque, j'ai parfois du mal avec les lectures trop "classiques" mais je te rejoins si l'on souhaite lire ce genre de roman rien ne vaut un Zola.

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  4. Tu vas trouver ma remarque super débile (et futile) mais à chaque fois je ne me retourne pas sur ce roman (comme sur plein d'autres de chez Points) à cause de ces couvertures avec ces photos de femmes moyennâgeuses. Va savoir pourquoi, ça me refroidit totalement, je trouve que ça fait un peu France Loisirs années 80, et du coup je n'ai pas envie de lire ces bouquins.
    #superficialité bonjour !

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    1. Haha tu m'as fait rire ! Je trouve que cette couverture l'est particulièrement et en même temps elle reflète le roman...
      Pour les autres de chez Points ça dépend vraiment mais effectivement il ne faut pas toujours s'arrêter à la couverture sinon bon nombre reste sur les étagères de la librairie.

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